La Fraternité Saint-Vincent-Ferrier, qui s’inspire de la tradition dominicaine, comporte des frères clercs et des frères convers. Ces derniers se distinguent par la couleur de leur habit et leurs occupations. Les frères clercs, qui sont diacres ou prêtres, et les frères convers poursuivent le même idéal : la perfection de la charité, autrement dit la sainteté. Pour des fils de saint Dominique, cela signifie la prédication de l’Évangile. Ayant consacré leur vie à ce même but par la profession religieuse, le prêtre et le convers sont autant religieux l’un que l’autre. La vocation de frère convers nous rappelle la valeur de la vie religieuse comme telle, état approuvé par l’Église pour tendre à la perfection de la charité par la pratique effective des conseils donnés par Notre-Seigneur lui-même dans l’Évangile : « Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans les cieux » (Mt 19, 21).
Le prêtre et le frère convers s’efforcent de réaliser cet idéal selon les dons que le Seigneur leur a départis. C’est ici que prend tout son sens la distinction entre frères clercs et frères convers. Les premiers se rendent utiles à l’âme du prochain par la parole et par leurs écrits, tandis que les seconds prêchent le Christ par leur travail et leur manière de vivre. Dans la mesure où le monde n’apprécie que les personnalités brillantes, la vocation de frère convers constitue une pierre d’achoppement. Par son style de vie, en effet, le frère convers rappelle la primauté de la contemplation et de l’humilité. Sa vie se nourrit d’oraison et du rythme quotidien de la liturgie qui trouve son sommet dans la sainte messe. S’il n’étudie pas autant que le frère clerc, le frère convers puise dans ses lectures les vérités qui alimenteront sa vie contemplative. Il aime à vivre dans ce climat de certitude et de vérité que constitue un couvent dominicain.
Ainsi, le frère convers réalise pleinement l’idéal du frère prêcheur. Il n’est pas un complément qui s’insère tant bien que mal dans la vie dominicaine. Dès le départ, saint Dominique a voulu que son ordre missionnaire fût soutenu par la prière et le travail des frères convers. C’est d’abord en assurant le bon fonctionnement du couvent que les frères convers coopèrent au ministère de la sainte prédication. Sans leurs efforts, les pères ne pourraient pas apporter aux hommes les biens spirituels qu’ils attendent. De sorte que, tout en demeurant au couvent, le frère convers sème et moissonne avec ses frères prêtres. Les frères convers sont aussi associés directement à l’apostolat des frères clercs en enseignant le catéchisme, en animant des pèlerinages ou en encadrant des camps de jeunes. Il existe également d’autres domaines, comme celui de l’art, auxquels se sont adonnés certains frères convers au cours de l’histoire de l’ordre dominicain. Avec les moyens qui lui sont propres, le frère convers transmet aux âmes la vérité qu’il a contemplée dans la prière. Cet idéal a été pleinement vécu par des frères convers comme saint Martin de Porrès ou saint Jean Massias, que l’Église n’a pas hésité à proposer comme modèles à la piété des fidèles. Ainsi l’Église nous rappelle que la vocation de frère convers est à même de mener au plus haut sommet de la vie chrétienne les âmes éprises de perfection.