Saint Vincent Ferrier
Né en 1350 à Valence (Espagne), ce dominicain est un apôtre des temps difficiles. Son siècle est bouleversé par de nombreuses guerres, la peste et le Grand Schisme qui divise la chrétienté.
Vincent parcourt alors l'Europe ; il prêche aux peuples, pacifie les cités et combat pour l'unité de l'Église. Sa sainteté, comme ses nombreux miracles, entraînent les foules. Chrétiens, juifs et musulmans se convertissent à sa parole en flammée qui rappelle l'imminence du jugement de Dieu.
Mort à Vannes le 5 mai 1419, saint Vincent laisse un chef-d'œuvre de spiritualité, son Traité de la vie spirituelle.
Un saint pour temps de crise
Est-ce que saint Vincent Ferrier (1350 - 5 avril 1419) a quelque chose à nous dire aujourd'hui ?
Voilà 575 ans qu'il est dans la vision de Dieu, et il me semble que trois rayons de sa gloire peuvent venir nous réchauffer. Oui, ce frère prêcheur du Moyen-Âge finissant, déchiré par le schisme et une guerre centenaire, miné par la décadence philosophique qui engendra la Réforme, a un message très actuel pour aujourd'hui. Tout simplement parce que notre monde post-chrétien et post-moderne est éminemment temps de crise comme le sien.
Vincent est ange du jugement. Au lieu de gémir sur les malheurs des temps, il soulève, du dedans, la tristesse d'un monde mauvais, par l'annonce d'une bonne nouvelle éternelle (Ap 14, 6). Il rappelle sans se lasser que l'absurde ne triomphe que si nous acceptons de nous laisser séduire, que le mal est vaincu par la lumière dans les cœurs qui attendent le Christ. Craignez Dieu et rendez lui gloire, car voici l'heure du jugement (Ap 14, 7). Vincent a prêché les grandes vérités qui nous bouleversent et ouvrent dans nos âmes, par le saisissement des immenses perspectives eschatologiques, les sources de la pénitence et les chemins de l'amour. N'avons-nous pas besoin que le tonnerre de cette voix de prophète nous réveille, dans nos existences compliquées et pesantes dont est trop souvent absente la pensée de la vie éternelle ? Oui, le cri de Vincent nous juge sur l'amour, parce qu'il annonce l'Époux (cf. Mt 25, 6).
Vincent est apôtre de chrétienté. Il a une conception totale de sa foi. À une époque où tout craque, où les pouvoirs temporels et spirituels ne s'entendent plus, où la naissance des antagonismes nationaux désagrège le corps de la chrétienté, où les hommes de la pensée perdent le sain réalisme de l'être, Vincent ne se résigne pas. Savant, nourri de Thomas d'Aquin, il enseigne sans relâche les clercs, conseille les princes, protège et convertit juifs et musulmans, apaise les querelles des cités. Devenu « légat du Christ », il jette toutes ses forces dans une gigantesque croisade pacifique, où, durant vingt ans, il sillonne l'Europe pour prêcher la royauté du Christ sur toute la création et en particulier sur les sociétés humaines (CEC, n° 2105). « Cette fameuse mission constitue l'un des faits les plus extraordinaires et les plus importants de l'histoire de l'Église » (Père Bernadot). La foi conquérante de Vincent fouette nos timidités, à l'heure où le profond désespoir de l'humanité contemporaine cache, « plus que nous ne le pensons, une silencieuse espérance qu'une chrétienté renouvelée pourrait constituer une alternative »(cardinal J. Ratzinger).
Vincent est homme apostolique, à l'image de son père Dominique. Qu'est-ce à dire ? C'est un contemplatif dont le cœur parle aux hommes. Tous les jours, il marche sur les routes comme un pauvre, il chante la messe (« l'œuvre la plus haute de la contemplation », dira-t-il), puis il prêche. Et les grands et les humbles, accourus écouter le bonhomme Vincent, cet homme qui ne parle que de Dieu ou qu'avec lui, le sentent tout proche d'eux, le comprennent et l'aiment. C'est qu'il présente à tous, en même temps que l'Évangile de son maître Jésus, le miracle qui l'accrédite : lui-même, sa vie héroïque, son enthousiasme communicatif. Il est bien de ces hommes évangéliques qu'il a décrits dans son Traité de la vie spirituelle, « très pauvres, très simples et très doux, ne pensant qu'à Jésus, ne parlant que de Jésus, ne goûtant que Jésus et Jésus crucifié ». Se mettre au contact de l'âme de Vincent, c'est se laisser envahir de cette soif apostolique qui consumait son cœur, et dont on retrouve l'écho dans la prière embrasée de Montfort.
On est confondu, n'est-ce pas, devant la confiance de ces saints en la grâce divine. C'est tout simplement qu'ils croient à l'Évangile. Qu'est-ce qui nous empêche d'en faire autant, pour obtenir du Cœur de Jésus, par Marie, les artisans de la Nouvelle Évangélisation ?
fr. Louis-Marie de Blignières
Saint Dominique
Vers la fin de la vie de notre Bienheureux Père, un jeune étudiant de Bologne, ne sachant quoi le plus admirer de la grâce de sa parole ou de son à-propos dans l'utilisation de la Sainte Écriture, lui demanda dans quel livre il avait le plus étudié. Dominique répondit : « Dans le livre de la charité, plus que dans les livres des hommes ». Voilà pourquoi celui qui fut si terrible à l'erreur obstinée put être appelé le doux Père Dominique par tous ceux qui l'ont connu. C'est qu'il pensait que le premier devoir de la vraie charité est de donner la vérité et de défendre contre l'hérésie, le pire de tous les maux de ce monde, les âmes rachetées du sang du Christ.
De cette pensée découle logiquement toute son action en ce monde : son premier contact avec l'erreur, en Languedoc, décide de sa vie. Sa charité s'émeut à la vue de la perte de tant d'âmes. « Que vont devenir les pécheurs ! ? », tel est le cri de sa prière incessante. Pour sauver ces âmes, il se met immédiatement à prêcher la vérité, et entame avec les hérétiques de longs entretiens où il s'efforce, souvent avec succès, de les convaincre.
Mais, devant l'obstination hypocrite des ennemis de la foi, il n'hésite pas à soutenir de sa prière et de ses conseils la croisade de Simon de Montfort : il fallait d'abord rétablir par la force la liberté de l'apostolat.
Pour continuer cet apostolat et en rendre les fruits durables, il suscite un Ordre, le premier Ordre monastique formé de clercs et non de laïcs : pour exercer la charité de la vérité, ses fils seront des prêtres et des docteurs, ils enseigneront et défendront la foi. Aussi saint Thomas est-il le vrai fils de la pensée de son Père Dominique. Dans l'institution de son Ordre, surtout, se révèle son génie : c'est sans tâtonnements et du premier coup qu'il le réalisa. Il ne revenait jamais sur une décision prise, disent ses contemporains. C'est qu'il concevait fortement, et que son Ordre, enfanté dans la prière et dans la méditation, était déjà dans sa pensée, complet et parfait, avant de paraître au jour.
Ayant pensé fortement, il voulait avec la même force persévérante qu'aucun obstacle ne pouvait briser. Lorsqu'il mourut en 1221, usé de fatigues et de pénitences, son oeuvre était réalisée telle qu'il l'avait conçue dans l'esprit de Dieu, et telle qu'elle devait se perpétuer en se renouvelant durant sept cents ans.
Tel fut notre doux Père, et le secret de cette pensée sereine forte, de cette volonté inébranlable, nous devons le chercher dans son union incessante avec son Dieu, car il a été dit de lui qu'il nd parlait que de Dieu ou qu'avec Dieu.
(d'après un missel dominicain)
Saint Thomas d'Aquin
L'illustre docteur, surnommé à juste titre l'Ange de l'École, naquit à Rocca-Secca, près de Naples, de la famille princière des Comtes d'Aquin. À seize ans, renonçant aux plus brillantes espérances, il revêtit l'habit des frères prêcheurs malgré l'opposition de sa famille. Après sa profession il fut envoyé à Cologne où il devint le disciple du bienheureux Albert le Grand. Le disciple devenu maître parut à son tour avec le plus grand éclat dans les chaires de l'Université de Paris. Sa vie se passa à parler et à écrire des choses divines. À quarante ans, il composa sa Somme de théologie, dont chaque article est un miracle, selon le mot du pape Jean XXII. C'est à sa plume aussi que l'Église est redevable de l'admirable office du Très Saint-Sacrement. Aussi humble que savant, Thomas refusa constamment toutes les dignités ecclésiastiques.
C'est dans l'oraison qu'il puisait ses lumières les plus vives. Prosterné au pied de l'autel ou quelquefois appuyé le front au tabernacle, il s'adressait à Dieu avec instance pour trouver la solution des problèmes de doctrine.
C'est dans une de ces circonstances qu'il entendit une voix du ciel qui lui disait : « Tu as bien écrit de moi, Thomas, que veux-tu pour récompense ? » – « Vous seul, Seigneur », répondit-il. Après avoir édifié ses frères par ses vertus, défendu et éclairé la sainte Église par sa parole et ses immortels écrits, Thomas, bien qu'épuisé par la maladie, se rendait, sur l'ordre du pape, au concile œcuménique de Lyon, quand il mourut à l'Abbaye de Fossa-Nova, le 7 mars 1274, à l'âge de 47 ans, en commentant devant les moines le Cantique des Cantiques.
Il fut canonisé par Jean XXII en 1323 et proclamé par Léon XIII patron officiel des écoles catholiques. Saint Thomas d'Aquin est dans l'Église le Maître, le Docteur par excellence. Les Papes ont exalté et imposé sa doctrine, qui est devenue la doctrine de l'Eglise. Quiconque est avec lui est sûr dans la foi, quiconque s'éloigne de sa pensée, devient suspect.
(d'après un missel dominicain)