« Sur ceux qui habitent à l’ombre de la mort,
une lumière s’est levée » (Is 9, 1)
Chers amis,
Je voudrais selon l’usage vous porter un message de paix, ce message que les Anges ont chanté au-dessus de la crèche de Bethléem : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et, sur la terre, paix aux hommes de bonne volonté ! » (Lc 2, 14). Mais la symphonie céleste est couverte par le fracas des guerres.
Guerre sur la terre, ici et là ; guerre tout près du lieu où est né le « Désiré des nations » (Ag 2, 8). Guerre dans l’Église, où certains bergers ne savent plus distinguer la droite de la gauche – « Malheur à ceux qui appellent le mal bien et le bien mal ! », dit le prophète (Is 5, 20) – et dispersent le troupeau plutôt que de le conduire et frappent la brebis plutôt que de la soigner ; où la bénédiction est tournée en malédiction ; où l’antique liturgie latine n’a pas encore partout retrouvé le « droit de cité » qui lui revient. Dans la nuit de Noël, quand je célèbrerai les saints mystères, j’aurai une prière particulière pour tous les fidèles qui en sont privés, contre leur vœu légitime.
Guerre dans les cœurs, submergés par le flot incessant d’images et d’informations qui les tiennent sous l’empire de la crainte et la léthargie de l’hébétude ; cœurs asservis par les modes, l’idéologie, la tristesse d’un monde sans beauté, le désespoir d’un monde sans horizon. Mais, dans cette guerre des âmes, il est des cœurs qui résistent à la laideur et au mensonge : fidélité des époux à leur mariage, des prêtres à leurs serments, des religieux à leurs vœux. Tranchées solides où s’abritent les bonnes œuvres et s’épanouissent les mystérieuses germinations de la grâce. Dans cette guerre, il y a la béatitude de tous ceux qui refusent une prétendue liberté sans le Christ et l’Évangile – le plus dur des esclavages ; il y a le front commun de ceux qui veulent vivre libres, sous l’empire du Conseiller-merveilleux, du Dieu-fort, du Père-éternel, du Prince de la Paix (Is 9, 5) !
Malgré les misères de l’homme et la méchanceté qui déborde en torrent de son cœur malade, le miracle de Noël s’accomplit. Le dessein de Dieu brise le plafond de verre de la suffisance et de la malice humaines pour poser le pied sur la terre. Dieu s’incarne, tout est possible. Rien ne peut résister à la puissance de l’amour du Dieu qui vient. « Et le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous » (Jn 1, 14). Au milieu de nos guerres, il est là, avec nous, l’Emmanuel (Is 7, 14).
À tous, joyeux et saint Noël !
fr. Augustin-Marie Aubry, prieur