Face à la mort, la mienne ou celle d’un proche, je suis contraint d’admettre qu’il y a plus fort que moi. Je voudrais vivre toujours. Ce désir sera frustré, car il est certain que ma vie se brisera contre la mort. Ou pour mieux dire : que la vie, telle que je l’expérimente maintenant, aura une fin. Nul n’échappe à cette réalité de la mort.
La mort, lieu de vérité
Les différentes attitudes de l’homme face à la mort révèlent le fond des cœurs. Pendant des siècles, dans une ambiance chrétienne, la mort était conçue comme une épreuve à franchir pour accéder à un nouvel état : l’Enfer pour les méchants, le Ciel pour les bons. Une vie de péché (une vie loin de Dieu) est punie de la peine éternelle, une vie bonne est récompensée par la vision de Dieu. Aujourd’hui, avec la perte du sens de la foi, cette perspective devient floue. L’au-delà de la mort est néant. Dans la pensée matérialiste, qui envahit la pensée occidentale, l’homme n’a pas d’âme, pas de principe spirituel, immatériel, qui donne vie au corps. La mort est la fin de la vie biologique, le corps n’a pas de valeur spéciale.
La mort occultée
La mort devient objet de scandale. On cache la mort : on meurt souvent seul à l’hôpital, plutôt que de mourir chez soi entouré des siens. On détruit le corps par incinération, plutôt que de le mettre en terre où lentement il se décomposera. Depuis quelques années, une pratique toute différente se développe : on met le corps au frigo. L’espoir est, non dans le Ciel avec Dieu, mais dans la science qui, croit-on, sera bientôt capable de pallier toutes les déficiences physiques et de faire durer le corps indéfiniment. C’est « la mort de la mort ». Ce projet, qui fait de la science une divinité, se fonde sur une attente de l’éternité, mais qui ne serait que la continuation de la vie ici-bas. Rien à voir avec l’éternité attendue et espérée par les chrétiens.
La mort transfigurée
Le chrétien est un imitateur du Christ. Par où le Christ est passé, il doit passer aussi. Le Christ a connu, pour notre salut, la souffrance et la mort. Nous connaîtrons aussi cette épreuve. Mais le Christ a franchi la mort en la vainquant. Si, dans notre mort, nous sommes unis au Christ (par la foi et la charité), nous serons aussi unis à Lui dans sa victoire : l’âme est récompensée et le corps sera glorifié à la fin des temps. Cette résurrection des corps, au dernier Jour, est la raison pour laquelle il faut entourer le cadavre d’honneur (par la liturgie et la mise en terre) : c’est un signe très clair de notre foi dans la résurrection finale. Sur les tombeaux des premiers chrétiens, on lisait souvent cette sobre et noble épitaphe : « in spe », c’est-à-dire « je suis allongé ici, dans l’espérance de la Résurrection ! »
Père Augustin-Marie Aubry
Texte paru dans Actuailes, le bimensuel d’actualités des 10-15 ans